One of These Days
(Auteurs : David Gilmour, Nick Mason, Roger Waters, Richard Wright)
Ce morceau instrumental, très représentatif d’un Pink Floyd à la fois « planant » et énergique, sera un des grands morceaux de scène du groupe au début des années 70.
Du concentré d'énergie
Le titre complet de ce morceau est en fait : One of These Days, I’m Gonna Cut You Into Little Pieces (« Un de ces jours, je te couperai en petits morceaux »), et serait une trouvaille de Nick Mason, qui le grogne plus qu’il ne le déclame, à la fin du second mouvement. Cette injonction s’adresse à un disk-jockey particulièrement énervant que le groupe avait dans sa ligne de mire. Encore une fois apparait l’humour d’un groupe à qui on a trop souvent reproché d’en manquer.
Sur fond de bourrasque, une note de basse se répercute en écho, puis une deuxième. La même basse reprend alors la même note sur un rythme syncopé, bientôt rejointe par la guitare. Sur cette trame musclée viennent se plaquer de vigoureux accords d’orgue de Wright, qui marquent le passage d’une note à l’autre, entre lesquelles la basse fait la navette. La batterie de Mason s’interpose pour présenter la guitare de Gilmour qui prend son envol sur quelques phrases avant de se taire, laissant le champ libre à la basse seule, qui, d’un son très dur, domine le second mouvement.
Sur cette basse, qui évoque un moteur diesel à régime lent, la guitare revient en envolées aériennes, en glissades typically floydish, jusqu’à ce que Mason grogne sa phrase-titre.
Ceci donne le signal du troisième mouvement, une sorte de déchaînement au son magistral et flamboyant, qui réunit sur le rythme initial tous les instruments dominés par la guitare qui lance de longues plaintes vers l’infini. Plus tard, c’est en lapstyle que Gilmour traitera, au bottleneck, l’ensemble de ce morceau. On a parfois pu lire ou entendre, ici ou là, la musique de Pink Floyd qualifiée de mollassonne : One of These Days, en 6 à 8 minutes bien senties, envoie dans les cordes ce genre de sentence.
La phrase éructée par Mason et sa traduction sont là.
1972-73 : des versions grandioses
One of These Days est présenté publiquement au cours de l’automne 1971, peu avant la sortie de Meddle dont il ouvre la première face. Ses premières interprétations montrent une pièce déjà bien en place, ne différant notablement de la version définitive que par la place en fin de morceau du grognement de la phrase-titre. Il sera joué sur scène jusqu’à fin 1973, quasiment à chaque concert où il connaît toujours un grand succès.
Au fil des interprétations, ce morceau grandira, enflera d’une façon monstrueusement magnifique. Certaines prestations confinent au grandiose. Les nappes d’orgue s’étirent sur un premier mouvement qui retarde au maximum le moment de s’ouvrir sur le second, lequel se mue en une machine hypnotique, dominée par une basse que Waters emmène dans des tourbillons toujours plus audacieux. Le troisième mouvement évolue en véritable happening musical, au son monumental. Si l’on ne devait qualifier de swinguant qu’un seul morceau de Pink Floyd, ce serait celui-là.
Après 1973
En 1974, One of These Days ne figure déjà plus au répertoire scénique de Pink Floyd. Mais il a engendré un héritier nanti de paroles : Raving and Drooling (« Délire et radotage ») qui deviendra Sheep (« Moutons ») dans Animals en 1977. Cet « héritier », pour pertinent et fort que soit son propos, est cependant moins convainquant que la composition dont il est issu. Pink Floyd, en 1977, est dans une période beaucoup moins propice aux délires que le début des années 1970. Ça ne rigole plus, ou alors seulement jaune…
On retrouve aussi une certaine parenté entre One of These Days et la longue intro de la seconde partie de Shine On You Crazy Diamond (album Wish you Were Here, 1975).
One of These Days reviendra dans le répertoire scénique du groupe lors de sa « renaissance » en 1987. Il sera joué encore lors des tournées de 1994-95. Mais ces versions, très sages, sont trop scolairement proches de l’enregistrement originel de Meddle. Les délires généreux de 1973 sont bien oubliés.
Une antériorité ?
Existe-t-il, dans le répertoire antérieur de Pink Floyd, quelque-chose qui puisse annoncer, d’une manière ou d’une autre, One of These Days ? Difficile à dire. Peut-être en peut-on voir des prémices dans Let There Be More Light (« Que la lumière augmente ») en 1968, avec sa basse proéminente à laquelle répond déjà, en fin de morceau, la guitare de Gilmour, nouvellement arrivé au sein du groupe. Ce que nous avançons là n’a aucune valeur d’axiome ou de postulat…
Dr Who s'invite chez Pink Floyd
Dans le second mouvement de One Of These Days, on remarque, plus ou moins évident selon les interprétations, le thème du générique du feuilleton TV britannique créé dans les années 60, “Dr Who”. C’est un clin d’oeil revendiqué par le groupe, le générique d’origine du feuilleton ayant déjà lui-même une couleur très floydienne. C’est peut-être même là la véritable inspiration de One Of These Days…
(merci à mon fils Gwenael de m’avoir signalé cette curiosité car, bien que de la génération concernée, je n’ai jamais vu un seul épisode du-dit feuilleton)
One of These Discs
One of These Days figure dans Meddle (1971), et en public dans The Delicate Sound of Thunder (« Le son délicat du tonnerre », 1988). Malgré leurs 17 ans d’écart, ces deux versions sont très (trop) proches. Il figure aussi dans les vidéos Pink Floyd à Pompéi (1972) dans une honnête version précoce (l’enregistrement en a eu lieu en octobre 1971, soit quelques semaines seulement avant la sortie de Medle), et P.U.L.S.E. (1994) dans une version proche de celle de Delicate Sound. On le retrouve enfin dans les compilations A Collection of Great Dance Songs (1981), Works (1983) et Echoes (2001). Aucune des versions flamboyantes de 1972-73 n’a connu de gravure officielle.
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Auteur de la page :
Blue Berry.